Au moment où la mercuriale des marchés des fruits et légumes s’affole, affichant des prix dépassant toute mesure, les personnes handicapées continuent de toucher une allocation d’à peine 4000 DA par mois. Lors de son passage, hier, au Forum d’El Moudjahid, le ministre de la Solidarité nationale et de la Famille, Djamel Ould Abbès, a promis d’améliorer la situation des personnes handicapées, en commençant par une révision à la hausse de leurs allocations.
Je suis en train de me battre pour obtenir une pension à 6000 DA. Par un souci d’équilibre du budget de l’Etat, le gouvernement a refusé notre requête, cédant une hausse allant de 3000 à 4000 DA, je suis conscient que cela n’est pas suffisant », a déclaré le ministre chargé de ce dossier. Le fait est que 192 951 personnes handicapées à 100% bénéficient d’une allocation financière d’un montant de 4000 DA/mois dans le cadre du programme d’aide sociale du ministère. Les personnes ayant un taux d’invalidité inférieur à 100% bénéficient d’une allocation de 300 DA/mois allouée dans le cadre du filet social.
Le ministère de la Solidarité nationale a entamé, depuis plus d’un an, une opération d’assainissement des listes des bénéficiaires des allocations pour traquer les indus attributaires. Sur les 720 000 Algériens qui profitent de l’aide de l’Etat, le département de la Solidarité nationale a découvert près de 121 000 indus bénéficiaires et 6000 « faux handicapés ». M. Djamel Ould Abbès ne cache pas sa satisfaction d’avoir pu économiser 5 millions de dinars grâce à cette opération. « Une femme a encaissé une allocation de non-voyante puis est repartie au volant de sa voiture », raconte-t-il. En tout et pour tout, l’Algérie compte près de deux millions de personnes handicapées et de malades chroniques invétérés.
Bien que les centres d’accueil des personnes déficientes existent, ils sont souvent difficiles d’accès pour les personnes qui en ont le plus besoin. Il existe ainsi près de 297 centres pour les handicapés dont 129 sont gérés par des associations avec l’aide de l’Etat, 97 centres pour les handicapés mentaux et 18 centres pour les non-voyants La majorité des centres pour handicapés restent désespérément vides en raison du mauvais emplacement de ces infrastructures. « Les études ont été mal faites. Il y a, par exemple, des centres pour personnes âgées dans des régions qui n’en ont pas besoin. Dans les Hauts-Plateaux, par exemple, les familles sont encore très soudées et il est rare que les parents soient placés dans un centre pour personnes âgées », explique M. Ould Abbès.
Le ministre estime que les besoins sont immenses en matière de prise en charge des infirmités motrices cérébrales et des autismes, un mal qui touche près de 39 000 Algériens. S’inspirant de l’expérience canadienne, le ministère de la Solidarité nationale a établi un plan pour la prise en charge de cette frange de la population.
Pour mettre fin au phénomène des malades mentaux errant dans les rues, le ministre espère mettre en place des « fermes pédagogiques ». L’idée est de mobiliser des terres pour permettre aux handicapés mentaux, sans attaches familiales, de s’occuper à faire de l’aviculture, de l’apiculture ou du maraîchage. Le ministère de la Solidarité envisage, par ailleurs, de prendre en charge les déplacements des malades et de leurs accompagnateurs en vue de subir des interventions chirurgicales. « Nous mettons à la disposition des malades graves, issus des régions enclavées, des billets d’avion pour se faire opérer dans les hôpitaux d’Oran, d’Alger ou de Annaba. Nous proposons des billets d’avion pour chaque voyage », a-t-il expliqué.
Évidemment, les personnes qui ont les moyens de faire le voyage ne sont pas concernées par cette mesure. Le ministre de la Solidarité nationale se vante d’avoir mis en place, en 2006, une loi-cadre qui protège les personnes handicapées. Il se dit « fier » du fait que le budget du ministère de la Solidarité soit passé de 60 millions de dinars en 1999 à plus de 95 milliards de dinars en 2009. « Je dépense cet argent avec conviction », précise Dr Ould Abbès. « En tant que médecin, je ne peux qu’être sensible à l’angoisse des familles qui ont un enfant handicapé à leur charge », dit-il, sur le ton le plus solennel, déclarant que son rôle est « d’apaiser les douleurs et de diminuer de l’isolement les plus démunis ».
Par Amel B.El Watan.