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Des pans entiers de l’histoire algérienne restent encore méconnus. Pendant des années, on n’a pas voulu parler de ces époques lointaines où l’Afrique du Nord était une région où tant de combats se menaient, où tant de réalisations se concrétisaient. Né à Constantine en 1878, Ernest Mercier fut un passionné du pays de Massinissa. Avant de s’éteindre à Paris en 1955 après avoir créé la Compagnie française du pétrole, il a écrit un ouvrage pour raconter la gloire et les tourments des rois berbères.
"Les rois berbères"* vaut le détour dans la mesure où il nous restitue une époque pleine de péripéties, de luttes, qui transmettent des leçons jusqu’aux temps contemporains. Ainsi la trahison de Jugurtha est entrée dans l’histoire ; « vendu » par Bokkus, on désigne aujourd’hui en kabyle la trahison par le terme de « elbokhs », en référence à cet épisode lointain.
« Un message fut envoyé à Jugurtha pour l’engager à venir traiter de la paix ; mais le Numide était trop loin pour consentir à se livrer ainsi aux mains de ses ennemis et il exigea tout d’abord que Sylla lui fût remis en otage. Pendant plusieurs jours, Bokkus hésita encore pour savoir s’il livrerait Sylla à Jugurtha, ou Jugurtha à Sylla. Enfin, il se prononça pour le dernier parti. Après bien des négociations, il fut convenu que chacun se rendrait, sans armes, à un endroit désigné, afin d’arrêter les conditions de la paix. Jugurtha, vaincu, par les assurances que lui prodigua son beau-père, se décida à venir au rendez-vous ; mais à peine était-on réuni que des gardes, cachés aux environs, se jetèrent sur le prince numide et le livrèrent à Sylla. Ainsi la trahison mit fin à cette guerre que le génie de Jugurtha aurait peut-être prolongée encore », écrit Ernest Mercier.
Ce dernier estime, à juste titre, que dans bien des cas, l’histoire de l’Afrique du Nord s’est concentrée sur celle de Carthage. Pourtant les Berbères ont de tout temps occupé la scène ; l’exemple du roi Massinissa est assez édifiant. Père d’un grand nombre d’enfants, Massinissa désigne à sa mort seulement trois d’entre eux comme héritiers : Micipsa, Gulussa et Manastabal. Micipsa eut l’autorité principale avec Cirta comme capitale ; Gulussa commanda les troupes et Manastabal fut chargé des affaires judiciaires. Micipsa était d’un caractère tranquille, épris de la philosophie grecque. Pour exercer seul le pouvoir, il n’hésita pas à éliminer ses deux frères ; il s’aida ensuite de ses deux fils, Adherbal et Hiemsal ainsi que de son neveu Jugurtha, fils naturel de Manastabal. Micipsa régna durant trente ans.
A sa mort, Jugurtha employa la force pour prendre le dessus sur Adherbal et Hiemsal. Guerre et paix se succédaient alors en Numidie ; que ce soit entre les rois berbères eux-mêmes ou contre Rome. Les révoltes étaient également courantes ; celle de Takfarinas contre les Romains, dans les Aurès, est restée dans les mémoires ; elle eut lieu vers l’an 17. Même s’il est souvent assez général, le livre d’Ernest Mercier permet au lecteur de connaitre une partie de l’histoire ancienne de l’Afrique du Nord.
* « Les rois berbères » d’Ernest Mercier, éditions Lumières libres, 108 pages, 360 DA.